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J’ai grandi avec la science-fiction. Aujourd’hui, je vis dedans.

Vue subjective dans une rue de New York avec un smartphone affichant une IA personnelle, et des éléments de réalité augmentée visibles dans le champ de vision : profil social, alerte deepfake, icône de portefeuille cryptoQuand j’étais ado, je lisais Asimov, regardais Blade Runner en boucle, et rêvais devant les écrans tactiles transparents de Minority Report. À l’époque, tout ça semblait lointain. Une vision poétique, parfois flippante, mais rassurante dans sa distance.
Ce monde-là, c’était le futur.

Sauf que voilà.

Un matin, je me suis réveillé. Et je vis dedans.

Pas de voitures volantes (pas encore), mais plein de petits trucs passés inaperçus. Des détails du quotidien qui, mis bout à bout, forment un tableau familier : celui des univers qui m’ont bercé.

Et franchement, c’est grisant. Et un peu flippant aussi.

L’IA qui discute avec moi

Je ne parle pas des assistants vocaux qui confondent “rendez-vous chez le dentiste” avec “livraison de dentifrice”.

Je parle d’intelligences artificielles capables de comprendre mon humeur, mes intentions, mes habitudes d’écriture. Capables de me proposer un plan d’article avant même que j’aie fini de formuler mon idée.

Ce truc-là, c’était le domaine réservé des droïdes bavards dans les romans cyberpunk. Aujourd’hui, c’est un onglet dans mon navigateur.

Et parfois, ça me donne l’impression de parler à un double numérique de moi-même. (Spoiler : ce n’est pas toujours rassurant.)

Les algorithmes qui décident ce que je vois

Un jour, j’ai liké une vidéo de sculpture sur bois.
Le lendemain, j’étais sur un feed TikTok rempli de tourillons, de gouges, et d’essences exotiques.
Le surlendemain, j’ai failli commander un tour à bois.

L’algorithme savait.
Il savait que j’étais réceptif, curieux, légèrement influençable après 23h.
Il savait que j’allais cliquer.

Dans les romans de SF, ces “systèmes” sont souvent les ennemis invisibles, les entités qui orchestrent la réalité. Aujourd’hui, ce sont les moteurs de recommandation. Et le pire, c’est qu’ils sont souvent très bons.

Mon identité ? Décentralisée, fragmentée, digitale

Je me connecte avec des wallets, je signe des transactions à la volée, je détiens des tokens qui prouvent que tel fichier m’appartient.

J’ai une identité numérique que je contrôle partiellement, parfois mieux que mon identité physique.
Dans certaines communautés, mon adresse publique vaut plus que mon passeport.

Est-ce que c’est normal ? Non.
Est-ce que c’est excitant ? Un peu trop.

Dans Snow Crash, Neal Stephenson inventait le “Metaverse” bien avant Meta.
Aujourd’hui, j’ai plusieurs avatars, plusieurs vies numériques. Et parfois, j’ai l’impression d’exister plus en ligne qu’ailleurs.

Le deepfake n’est plus une fiction

Le jour où j’ai vu une vidéo de Morgan Freeman qui n’était pas Morgan Freeman, j’ai compris.
La frontière entre “réel” et “synthétique” est en train de se dissoudre.

Et ce n’est plus de la fiction : c’est TikTok, c’est Instagram, c’est YouTube.
C’est cette génération qui naît avec des visages générés, des voix synthétiques, des souvenirs modifiés à coups de filtres.

Blade Runner, encore lui, nous posait la question des faux souvenirs.
On y est. Littéralement.

Et pourtant, le frigo ne vole toujours pas

Pas de voitures antigrav, pas de portails de téléportation (même si j’ai une app pour suivre mes livraisons minute par minute, c’est pas mal non plus).

Mais entre les IA qui écrivent mieux que certains humains, les voix clonées qui bercent nos parents âgés, les mondes virtuels persistants et les crypto-économies qui réécrivent la notion de valeur, on a déjà basculé dans quelque chose.

Un monde où le réel devient flou, le futur devient familier, et où la science-fiction est en train de rattraper la réalité.

Ce n’est plus le futur. C’est maintenant.

Je ne fantasme plus sur un monde technologique à venir.
Je me demande plutôt comment l’habiter intelligemment.

Comment ne pas me faire piéger par les algos.
Comment rester humain dans un monde de machines.
Comment rêver encore, sans devenir cynique.

Et surtout, comment éviter de vivre dans une dystopie… sans m’en rendre compte.

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